mardi 21 mai 2013

Artprice : la financiarisation du Marché de l'Art est acquise avec les dernières ventes de NY

Comme l'a indiqué Artprice dans son célèbre rapport du Marché de l'Art 2013, le Marché de l'Art connaît une véritable mutation économique, géopolitique et sociologique où le nombre d'acteurs ne cesse de croître de manière exponentielle sur l'ensemble des continents.

Selon thierry Ehrmann, Président d'Artprice, "Nous sommes indiscutablement entrés, notamment à travers les process de normalisation du Marché de l'Art dont Artprice est l'auteur unique, dans une financiarisation de ce Marché. Elle provient d'une multiplication exponentielle des flux financiers et du développement de la pratique des opérations financières qui impactent le Marché de l'Art en profondeur."

Il est vrai qu'avec Artprice, les acteurs du Marché possèdent toute une palette d'analyses et d'outils indiciels (Artprice Screen) qui leur permettent d'appréhender ce Marché comme notamment celui des actions.
 Les ventes spectaculaires, tant dans les volumes constatés que dans les records atteints, viennent corroborer les prévisions d'Artprice à travers ses indices de marché avancé (AMCI : Art Market Confidence Index).

Nous noterons, selon thierry Ehrmann, "La France est définitivement exclue de cette nouvelle géopolitique. Un simple constat le démontre amplement. Une unique journée de vacation à New York correspond exactement au chiffre d'affaires annuel de la maison France (505M€) sur l'ensemble du Fine Art. Ce chiffre clôt définitivement le débat franco-français."

Artprice a analysé de près les derniers résultats de New York qui cautionne parfaitement ces différentes analyses et prévisions.

New York : le haut de gamme contemporain explose

"Comme l'an dernier, l'art contemporain rapporte plus que l'art impressionniste et moderne : si Sotheby's et Christie's généraient 578,3 m$ de produit de ventes en 102 coups de marteau lors des cessions contemporaines 2012 (un record pour l'art contemporain), leurs résultats cumulés culminent cette fois à 691,7 m$ dont un record historique de 435 m$ enregistrés par Christie's le 15 mai 2013."
Les ventes impressionnistes et modernes des 7 et 8 mai 2013 ont rapporté 388,5 m$ (frais inclus) à Christie's et Sotheby's. Dans ce combat de chefs entre les deux maisons de ventes leaders, Sotheby's l'emporte sur sa rivale, comme ce fut déjà le cas l'année dernière grâce au record mondial d'enchère décroché par Le Cri d'Edvard Munch (230 m$ de résultat pour Sotheby's ce 7 mai 2013 et 158,5 m$ pour Christie's le lendemain). Sotheby's, qui espérait engranger cette année au moins 60 m$ grâce à deux toiles, l'une de Cézanne, l'autre de Modigliani, a réussi son pari avec un superbe score pour Les Pommes de Paul Cézanne (1889, 38,5 cm x 46 cm), oeuvre estimée entre 25 m$ et 35 m$, finalement vendue 37 m$ (41,6 m$ frais inclus) et une adjudication plus mesurée de 23 m$ pour L'Amazone d'Amedeo Modigliani (soit 25,9 m$ frais inclus).

Du côté de l'art contemporain, dont les sessions suivent traditionnellement celles d'art moderne, les têtes d'affiche du cru 2013 confirment absolument les tendances enregistrées l'an dernier : le marché est en effet avide d'oeuvres américaines et européennes, réalisées entre les années 1940 et la fin des années 1960. En 2012, les plus grandes signatures de l'art contemporain voyaient déjà leurs records d'enchères déclassés à hauteur de plusieurs millions de dollars. Yves Klein révisait alors son précédent sommet de 11 m$, Gerhard Richter de près de 12 m$, Mark Rothko de 12,5 m$ et Jackson Pollock de 25,6 m$.

Cette envolée des prix s'est encore confirmée, d'abord le 14 mai 2013 chez Sotheby's où Yves Klein enregistrait un nouveau record pour une oeuvre tridimensionnelle (Sculpture Eponge Bleue
Sans Titre cédée 22,005 m$ avec frais), Gerhard Richter asseyait encore son statut d'artiste vivant le plus cher du monde avec 2,6 m$ de plus que son dernier record (Domplatz, Mailand, une huile sur toile réalisée en 1968 et adjugée 33 m$, soit 37,1 m$ avec frais. Son précédent record culminait à 34,16 m$ frais inclus avec Abstraktes Bild, une oeuvre de 1994 vendue en octobre 2012 chez Sotheby's Londres).

Le 15 mai, la vente époustouflante de Christie's démontre combien la demande globalisée sur le très haut de gamme repousse sans cesse les limites : 94 % de lots vendus (6 % d'invendus seulement sur les 70 lots offerts), neuf ?uvres cédées plus de 10 m$, de nouveaux seuils de prix atteints notamment pour Roy Lichtenstein , Jean-Michel Basquiat et Jackson Pollock . Ces trois artistes plantaient déjà de nouveaux records multimillionnaires l'année dernière, mais la compétition des prix ne devrait pas s'arrêter là : Roy Lichtenstein est en train de rattraper les sommets d'Andy Warhol, autre maître du Pop art, avec sa Woman with Flowered Hat qui culmine à 56,1 m$ commissions comprises (plus de 11 m$ que Sleeping Figure, précédent record s'élevant à 40 m$ au marteau et à 44,8 m$ avec les frais).
La cote de Jean-Michel Basquiat continue elle-aussi de s'affoler, avec quelques millions supplémentaires à ajouter à ses records de l'an dernier : sa toile Dustheads sera payée 48,8 m$ par son nouveau propriétaire, bien au-delà de l'estimation de 25 m$ à 35 m$ et du précédent record à 26,4 m$ frais compris (adjudication de 23,5 m$ pour Untitled de 81, le 14 novembre 2012).

Course aux records pour les expressionnistes abstraits américains

Autre tendance forte, la force de frappe des expressionnistes abstraits américains est véritablement un enjeu majeur pour la bonne tenue des ventes d'art contemporain. Le 14 mai, Sotheby's constatait que la moitié de son offre très haut de gamme (oeuvres à plus de 10 m$) tenait en effet sur les seules signatures de Barnett Newman , Clyfford Still et Jackson Pollock . Le meilleur résultat de cette vacation récompense ainsi un chantre de l'expressionnisme abstrait avec Newman qui culmine à 43,8 m$ (frais inclus, adjudication de 39 m$). La toile honorée d'une telle enchère (nouveau record pour l'artiste) est Onement VI, une ?uvre monumentale vibrante de couleur bleue, couleur méditative par excellence qui lui valut d'être qualifiée par Sotheby's de "portail vers le sublime". L'artiste déclasse ainsi de quelque 19 millions un précédent record enregistré lors des ventes de mai 2012 (20 m$, Onement V, 8 mai, Christie's).

L'envolée des cotes expressionnistes s'est poursuivie le lendemain soir chez Christie's, Jackson Pollock en tête avec son dripping, Number 19, 1948 vendu pas moins de 58,4 m$ avec les frais. L'?uvre a crevé un seuil d'estimation haute de 35 m$ et établi un nouveau record mondial pour l'artiste. Son dernier record d'enchère est frais de six mois et apparaît comme une bonne affaire à 18 m$ de moins (Number 4 se payait 40,4 m$ frais inclus, adjudication de 36 m$ le 13 novembre 2011, Sotheby's).

Parallèlement aux records, une vente, même de prestige, vient avec son lot de déceptions. La vente impressionniste et moderne de Christie's rayonnait d'abord par l'adjudication record du Petit Pâtissier de Chaïm Soutine, mais fut ternie par le défaut de vente du portrait de Madame Matisse au kimono, peint par Derain en 1905 et estimé entre 15 m$ et 20 m$.

Du côté des cessions contemporains, quelques oeuvres affichant des estimations à huit chiffres n'ont pas trouvé preneur, dont une toile de Francis Bacon (Study for Portrait of P.L., estimée entre 30 m$ et 40 m$ chez Sotheby's et deux ?uvres de Jeff Koons , estimées entre 6 m$ et 15 m$.